Départ de Mars Orbiter Mission : un exploit spatial indien

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Vue d’artiste de Mars Orbiter Mission. (Crédit : ISRO)

Le 1er décembre 2013, la sonde indienne Mars Orbiter Mission vient de quitter la gravité terrestre pour se diriger vers Mars. Cet événement, suivi avec effervescence dans les réseaux sociaux, marque l’entrée de l’Inde parmi les voyageurs interplanétaires, avec les États-Unis, la Russie et l’Europe.

Ce départ n’a cependant pas été rapide : Mars Orbiter Mission, aussi appelé «Mangalyaan» en hindi, a pris, depuis son lancement, le 5 novembre, plus de 25 jours pour entrer dans l’espace interplanétaire. Par comparaison, la sonde MAVEN de la NASA, qui avait décollé deux semaines après Mangalyaan est au même moment bien plus avancée dans sa trajectoire vers Mars.

Une trajectoire originale

Pourquoi une telle différence ? Elle est principalement due à une contrainte technique : le véhicule de lancement de Mangalyaan n’est pas assez puissant pour propulser la sonde directement vers la planète rouge. En effet, Mars Orbiter Mission, avec son budget de 73 millions d’euros, est la mission la moins chère de l’histoire spatiale martienne. L’Organisation de Recherche Spatiale Indienne (ISRO) ne pouvait donc se permettre d’avoir d’un engin du même calibre que le véhicule de lancement de MAVEN, une mission pour laquelle la NASA a dépensé dix fois plus d’argent.

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Schéma de la trajectoire que Mars Orbiter Mission, au 1er décembre 2013, a accompli autour de la Terre. (Crédit : ISRO)

Pour compenser ce manque de puissance, les ingénieurs de l’ISRO ont imaginé une trajectoire originale : Mangalyaan va, autour de la Terre, décrire six ellipses de plus en plus allongées avant de se diriger vers Mars. Cette trajectoire est illustrée par la figure ci-dessus, tirée de la page Facebook de l’ISRO. En quoi cette trajectoire en boucles pourrait aider la sonde indienne à quitter la gravité terrestre? C’est que c’est justement cette gravité terrestre qui va donner la puissance supplémentaire pour projeter Mars Orbiter Mission vers Mars. Cette technique, appelée assistance gravitationnelle, est bien connu dans la mécanique spatiale. Les sondes Cassini, Voyager 1 et Voyager 2, et Galileo ont recouru à l’assistance gravitationnelle.

Mais c’est bien la première fois que l’on utilise ce principe pour envoyer une sonde de la Terre vers l’espace interplanétaire. Auparavant, toutes les sondes qui utilisaient l’assistance gravitationnelle se trouvaient déjà hors de portée de la Terre1.

À chaque passage de la sonde Mangalyaan au point le plus proche de la Terre, le périgée, les techniciens de l’ISRO vont accélérer l’engin spatial de telle sorte qu’il puisse se mettre dans une orbite encore plus allongée, jusqu’à pouvoir effectuer une trajectoire hyperbolique vers Mars. Ces petites accélérations sont réparties en 6 fois et durent en tout 40 minutes.

Un exploit spatial pour l’Inde

De telles manœuvres permettent de faire une économie conséquente de carburant. Mais elles ne se font pas sans difficultés. Il faut aux techniciens beaucoup de vigilance et de concentration pour effectuer les différentes étapes à temps, et avec précision. De plus, la présence des ceintures de radiations de Van Allen peut poser un problème technique, car, en cas d’exposition trop prolongée, le plasma risque d’abîmer les composantes de la sonde.

Ces défis ont été relevées avec brio par l’ISRO, qui peut être fier d’avoir effectué le départ vers Mars le plus original de l’histoire spatiale. Mais tout n’est pas encore fini : les ingénieurs doivent encore effectuer plusieurs manœuvres. La prochaine aura lieu le 11 décembre, et la dernière en septembre 2014, lorsque la sonde arrivera vers Mars. Les dates et lieux de ces manœuvres sont marquées en croix dans la figure ci-dessous, tirée de la page Facebook de l’ISRO.

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Schéma de la trajectoire de Mars Orbiter Mission. (Crédit : ISRO)

Si tout se passe bien, Mars Orbiter Mission pourra, sur place, effectuer des analyses de l’atmosphère martienne ou explorer la surface de la planète rouge. Quoi qu’il en soit, l’Inde vient de montrer aux yeux du monde qu’il est possible de concevoir en à peine 15 mois et avec peu de budget une mission spatiale vers Mars. Ceci remplit une bonne partie des objectifs technologiques de cette mission et contribue largement à la fierté nationale du pays. On ne peut qu’admirer la prouesses de ces techniciens durant ces 25 jours de manœuvres. Les Indiens nous ont ainsi prouvé qu’il est possible d’innover très simplement, avec le peu de choses à sa disposition. Et ils nous ont tracé une route pour atteindre les étoiles, avec panache.

Notes :
1. Certaines personnes pourront me rétorquer que la sonde Galileo a utilisé par deux fois l’assistance gravitationnelle de la Terre. Mais il faut savoir que cette sonde se trouvait déjà dans l’espace interplanétaire avant de recourir à ce principe pour se propulser vers Jupiter, ce qui n’est pas le cas de Mars Orbiter Mission qui était toujours lié à la gravité terrestre avant de se propulser vers Mars.

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